Kinshasa et Kampala ont signé un mémorandum révisé pour intensifier leur coopération militaire contre les ADF et autres groupes armés actifs en Ituri. Ce nouvel accord, paraphé dans la capitale congolaise, ce vendredi 20 juin, prévoit une extension de l’opération conjointe Shujaa et une meilleure coordination stratégique entre les deux armées.

Le chef d’état-major des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), le général Jules Banza Mwilambwe, et son homologue ougandais, le général Muhoozi Kainerugaba, ont signé, vendredi 20 juin à Kinshasa, un mémorandum d’entente révisé dans le cadre de l’opération militaire conjointe Shujaa.

Lancée en novembre 2021, cette opération conjointe vise à neutraliser les Forces démocratiques alliées (ADF), un groupe armé ougandais affilié à l’organisation État islamique, actif dans les territoires de Beni (Nord-Kivu) et d’Irumu (Ituri). Le document révisé redéfinit les objectifs de cette coopération en fonction de l’évolution du contexte sécuritaire, en actant un renforcement des opérations militaires et leur extension à de nouvelles zones en Ituri, notamment Mambasa, Mahagi, Aru et Djugu.

Ces territoires restent le théâtre d’activités d’autres groupes armés, tels que la milice CODECO, accusée de graves exactions contre les civils. L’élargissement du champ d’action de l’opération Shujaa s’accompagne du déploiement renforcé d’unités de renseignement et d’une coordination tactique accrue entre les deux armées. Le mémorandum prévoit également une révision des dispositifs logistiques et une meilleure gestion des ressources humaines et matérielles.

Au-delà des actions militaires, l’accord accorde une attention particulière aux infrastructures. La sécurisation des travaux de réhabilitation de la route Kasindi-Beni-Butembo — axe stratégique pour les opérations militaires et le désenclavement des zones affectées — est explicitement mentionnée parmi les priorités.

Depuis son lancement, l’opération Shujaa a permis la destruction de plusieurs bases des ADF, notamment entre les villages de 47 et Kota-Okola, aux alentours de Mamove. Une frappe conjointe menée en septembre 2024 avait notamment ciblé un bastion clé du groupe. Une évaluation bilatérale effectuée en mai 2024 avait salué certaines avancées tout en soulignant les faiblesses persistantes, notamment en matière de coordination et de logistique.

Des organisations comme le Groupe d’étude sur le Congo (GEC) et Ebuteli demeurent critiques. Dans un rapport publié en 2022, elles qualifiaient les résultats de l’opération de « mitigés », pointant des lenteurs opérationnelles et l’incapacité à éradiquer durablement la menace ADF. La révision du mémorandum apparaît ainsi comme une réponse aux limites identifiées dans la phase précédente.

La présence à Kinshasa du général Muhoozi Kainerugaba, fils du président ougandais Yoweri Museveni, revêt par ailleurs une dimension diplomatique non négligeable. Ses précédentes déclarations polémiques sur les réseaux sociaux avaient provoqué un incident diplomatique avec Kinshasa. En janvier 2024, la cheffe de la diplomatie congolaise, Thérèse Kayikwamba Wagner, avait exigé des explications officielles. Le nom du général a également été cité dans le cadre du procès de Corneille Nangaa, ancien président de la CENI passé à la rébellion avec l’Alliance Fleuve Congo (AFC), certains témoins l’accusant d’avoir hébergé des membres du mouvement en Ouganda.

Malgré ces tensions, Kinshasa et Kampala affichent leur volonté de coopérer sur le plan sécuritaire. L’opération Shujaa demeure, pour les deux capitales, un instrument essentiel dans la lutte contre l’insécurité dans l’est de la RDC.


Gloire MALUMBA.K